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L'autre jour, dans une voiture du RER A, entre La Défense et Paris, une femme "originaire de l'Est de l'Europe", en petite robe et chaussures lègères, malgré le froid, tenant un bébé accroché à son flanc, aborde les voyageurs en tendant la main, assistée d'un garçonnet qui doit bien avoir six ou sept ans. Parvenu à ma hauteur, je lui lance : "Toi, tu devrais être à l'école à cette heure-ci !".

J'ai beau être un démocrate bon teint, prêt à défendre la veuve et l'orphelin, face au problème de ceux qu'on appelle "les Roms", j'avoue que j'ai des sentiments plus que mitigés.

Et je ne peux m'empêcher de penser à Hans Münch, ce médecin nazi ayant officié à Auschwitz, et que Daniel Mermet avait réussi à interviewer pour son émission sur France Inter : Là-bas si j'y suis. Et Münch d'expliquer à Mermet comment il s'y prenait pour régler leur sort aux tziganes du camp : "Ils étaient sales, incapables de travailler, même pas aptes à s'occuper de leurs enfants. Alors, on les a envoyés à la chambre à gaz... Mais vous auriez fait comme nous !".

Il y a quelques mois, deux jeunes filles Rom se sont noyées sur une plage italienne. C'est encore Mermet qui rapportait le fait divers dans son émission sur France Inter. Non seulement personne n'a cherché à sauver ces deux gamines de la noyade mais, de surcroît, les deux cadavres sont restés plusieurs heures sur la plage sans que quiconque ne se décide à les transporter ailleurs.

Manifestations de racisme et de xénophobie ? Sans doute. Il faut dire que les Italiens ont fort à faire en ce moment, avec, par ailleurs, ces arrivées massives de boat-people africains sur l'île de Lampedusa, où la situation est devenue tout bonnement extravagante.

L'Italie serait-elle revenue une soixantaine d'années en arrière, à en juger par les succès électoraux engrangés par les néo-fascistes ? Comment expliquer, sinon, que la Ligue dite du Nord ait enlevé la mairie de la localité italienne la plus méridionale, donc la plus proche de l'Afrique, située précisément à... Lampedusa ?

Ici, on démantèle des campements de Roms, là, on les expulse vers la Roumanie, ailleurs, on manifeste bruyamment - et uniquement par le verbe - sa solidarité avec ces parias... Mais en attendant, les partis d'extrême-droite progressent partout en Europe et, contre cette progression, les organisations humanitaires ne semblent apparemment ne détenir aucun antidote !

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Nous sommes tous des Roms, au point d'aller vivre avec eux dans la gadoue et le caca, voire de les héberger chez nous ?

Et puis après ?

Après ? Rien ! Les campements démantelés vont renaître ailleurs, un peu plus loin... Les belles âmes pétries d'anti-racisme vont rentrer chez elles, avec la conscience tranquille de ceux qui ont réalisé une bonne action en manifestant avec banderolles et slogans, sans qu'aucun d'eux ne se résolve à offrir l'hospitalité au moindre Rom.

Et, tous les jours, on continuera de croiser des femmes en petite robe et chaussures légères dans le RER, passant leurs journées à mendier en compagnie d'enfants qu'elles auront soustrait à l'école, les condamnant à échouer comme elles, dans la mendicité !

Et c'est là que je me dis que c'est quand même incroyable que la société manque d'imagination à ce point !

Essayons de prendre les choses par le bon bout : n'importe quel(le) bon(ne) étudiant(e) en sociologie voit bien que si les "immigrés" d'origine africaine et présents en Europe sont majoritairement d'origine paysanne (l'Afrique étant un continent sous-urbanisé, les villes n'y étant généralement que d'immenses bourgeonnements de bidonvilles où viennent s'entasser des grappes de paysans fauchés, phénomène que l'on observe partout dans le Tiers-monde), les Roms cumulent trois types de stigmates : ce ne sont pas des citadins, mais ce ne sont pas non plus des paysans et, par-dessus le marché, ce ne sont même pas des gens du voyage (forains, artisans itinérants...). C'est dire s'ils ne sont à leur place nulle part, et ce, d'autant plus que, non scolarisés, ils peuvent à peine communiquer avec les indigènes des pays traversés.

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N'en déplaise aux héritiers de l'Abbé Pierre, à Albert Jacquard et à Monseigneur Gaillot et autres militants du Tiers-mondisme tous azimuts, quand je vois les images qui précèdent, je dis "Pas d'accord !". Parce qu'en attendant, nos militants tiers-mondistes, avec leurs belles manifestations et leurs belles phrases, qu'ont-ils fait concrètement pour que ces gens cessent de patauger dans leur "caca" ? Rien ! C'est comme pour les sans-papiers du Canal Saint-Martin à Paris : on manifeste, des stars du cinéma et de la chanson se permettent même de venir passer une nuit sous la tente, puis elles s'empressent de retourner vite fait, bien fait, dans leur duplex douillet et cosy des beaux quartiers, après avoir fait un grand sourire à la caméra.

Et pourtant, il va bien falloir trouver une solution pérenne qui ne se contente pas de faire déplacer des campements ni de manifester bruyamment sans que cela débouche sur quoi que ce soit de consistant. Et puisqu'apparemment, les milieux politique et associatif manquent d'imagination, je m'en vais leur faire quelques suggestions.

Le fait est que des solutions existent, qui passent par les sujets les moins stigmatisés de ces populations : les enfants, lesquels, pour peu qu'ils soient scolarisés, présentent une grande plasticité intellectuelle et montrent des aptitudes à l'intégration nettement supérieures à celles de leurs parents.

Voilà pourquoi, moi, je m'attaquerais d'abord à la question de la scolarisation des enfants, en mettant les parents en demeure de laisser leurs enfants aller à l'école, sous peine de se les voir retirer pour être confiés à des familles d'accueil.

Un des principaux problèmes avec ceux qu'on appelle "Roms", c'est que ce ne sont pas des citadins, mais pas des paysans non plus. Ce qui explique l'échec systématique de toutes les tentatives opérées jusqu'à présent pour les intégrer à quoi ? Le savent-ils eux-mêmes ?

Parce que s'ils passent le clair de leur temps en France, à mendier, ou à faucher dans les sacs et les poches des touristes, c'est parce qu'ils ne peuvent pas faire autrement, ou parce qu'ils ne veulent pas faire autrement ? Et autrement, ça veut dire quoi ? Travailler la terre ? Ont-ils jamais vécu dans des fermes, à la campagne ? Et travailler en ville ? Ça voudrait dire qu'ils pratiquent un métier dûment appris ?

Ni campagnards, ni citadins, donc, ce qui les mène automatiquement à la vadrouille et à la mendicité, toujours en marge, comme des parias. Et face à ce marasme, personne pour proposer quoi que ce soit de consistant, entre rafles, expulsions, et manifestations de solidarité stérile.

Dans ces conditions, pourquoi ne pas expérimenter un habitat intermédiaire, qui ne se situerait ni à la ville ni à la campagne, ou plutôt se situerait entre la ville et la campagne ? Cet habitat, on peut le voir sur tous les chantiers de construction.

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Sur la dernière image, à droite, on a là un bungalow de chantier qui pourrait parfaitement être aménagé en école, au sein d'un village provisoire qui ressemblerait à celui représenté à gauche.

Encore deux clichés sur les abris de chantier : d'abord une image aperçue sur le chantier de la piscine Molitor (Paris 16ème, Porte d'Auteuil), en cours de réfection : un petit immeuble construit à la manière d'un Lego à partir d'abris de chantiers superposés. Plus bas, un extrait du magazine du réaménagement du quartier des Halles, à Paris.


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Il ne devrait pas être difficile de trouver des étudiants voire des retraités de l'enseignement prêts à offrir un peu de leur temps à une mission d'intérêt général : sortir les Roms de l'analphabétisme et de l'illettrisme pour casser la spirale qui en fait des mendiants de père en fils et de mère en fille.

Apprendre aux Roms à lire et à écrire, à se servir de toilettes au lieu de faire leurs besoins partout, à élever leurs enfants dans un environnement relativement confortable, ce n'est quand même pas la mer à boire !

Voilà qui nous changerait des rafles policières d'une part, et des manifestations larmoyantes et stériles des professionnels de l'humanitarisme, d'autre part.

Et après les avoir assignés à résidence, de manière à scolariser les enfants, et à initier les adultes à un certain nombre d'activités artisanales (ex. le recyclage des déchets) ou semi-agricoles (ex. le maraîchage), nous aurions là une population qui aurait les moyens de gagner sa vie décemment en tournant définitivement le dos à la mendicité.

Après quoi, c'est la tête haute qu'ils pourront rentrer chez eux, dans leur Roumanie, Hongrie ou Yougoslavie natale.

Alors, on résume ?

  • On commence par ce constat simple : en raison de leur mode de vie dans des bidonvilles en marge de sites urbains, les Roms s'avèrent être ni de vrais citadins, eux qui ne savent ni lire ni écrire et ne maîtrisent aucun des métiers de la ville, ni de vrais campagnards, eux qui ne travaillent pas la terre.

  • Ce qui veut dire que tenter de les intégrer soit dans un environnement urbain, soit dans les campagnes et, a fortiori dans des pays dont ils ne parlent pas la langue, est un leurre absolu !

  • Donc, dès lors qu'ils ne sont intégrables ni dans les villes, ni dans les campagnes, on pourrait se retrouver devant une espèce de quadrature du cercle. Et c'est précisément là qu'il faut faire preuve d'imagination.

  • Et en l'occurrence, l'imagination consisterait à privilégier l'avenir de ces populations, qui passe par la "civilisation" des enfants via leur scolarisation, tout en soutirant ces gens du "caca" dans lequel ils ont tendance à végéter, ce qui passerait par un habitat intermédiaire entre ville et campagne.

  • Cet habitat existe en théorie, et même un peu dans la pratique, puisqu'il est abondamment utilisé sur tous les chantiers de France et de Navarre.

  • L'aménagement de villages faits de bungalows de chantiers et situés en marge des villes présente un triple avantage : a) offrir aux "Roms" un habitat bien plus confortable que les abris de carton et de contreplaqué dans lesquels ils s'entassent ; b) épargner aux citadins le spectacle immonde de bidonvilles situés au bas de chez eux ; c) permettre aux travailleurs sociaux intervenant auprès de ces populations de travailler dans des conditions à peu près acceptables.

  • Tout ce programme pourrait être réalisé en deux ou trois ans par des équipes essentiellement composées de bénévoles, sans exclure forcément les entreprises spécialisées, dès lors que l'Union européenne semble avoir de gros moyens !

  • Mais s'il fallait ne retenir qu'une raison, et une seule, de procéder aux mesures que je préconise, à savoir une assignation des Roms à résidence dans un environnement sécurisé et viable, elle serait d'ordre sanitaire, à savoir que, par définition, les maladies contagieuses ne choisissent pas sur qui elles tombent ! Alors, imaginons qu'en raison de la saleté dans laquelle ils végètent dans leurs campements, des Roms en vadrouille se mettent à disséminer les germes de la gale, du choléra, de la tuberculose voire de toute autre maladie contagieuse lors de leurs pérégrinations sur les marchés et dans les transports en commun, alors le coût de la (= absence de) politique actuelle serait faramineux !
  • Ce sont, donc, des Roms parfaitement civilisés (au sens étymologique du terme), alphabétisés et capables d'exercer un métier qui rentreraient dans leur pays d'origine, dont ils n'auraient jamais dû partir, en tout cas, pas pour mendier ou chaparder chez les autres ! Ou alors, ils resteraient dans le pays d'accueil, en qualité de citoyens de l'Europe communautaire, mais cela supposerait qu'ils en maîtrisassent les us et coutumes, à savoir ceux d'une société "civilisée" c'est-à-dire urbanisée.

Et comme preuve qu'à la médiocrité, nul(le) n'est tenu(e), nous avons là un bel exemple d'intégration, pour reprendre un vocable à la mode :

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Mais on ne saurait réduire l'histoire de cette jeune fille à une simple question administrative de "papiers en règle ou pas en règle" ! Car le principal message qui se dégage de son parcours est double : d'une part, à l'égard de quelques indécrottables racistes qui pensent que "les Roms ne sont que des voleurs de poules", elle vient ici tordre le cou à tout un tas d'allégations malveillantes et stupides. Mais surtout, par ailleurs, à l'égard de sa propre communauté, sa réussite signifie que ceux des Roms qui ne trouvent rien de plus "intelligent" à faire que de trimballer leurs enfants pour mendier dans le métro parisien ou à travers les rues de Lyon ou de Marseille, au lieu de les envoyer à l'école, sont les premiers responsables de la mauvaise image de mendiants ou de voleurs de poules qui leur colle encore à la peau du fait des racistes évoqués plus haut.

       
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