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Globale imposture

 

Pour en finir avec la méthode dite "globale de lecture."...

(…) Seulement 27% des enfants âgés de 6 à 8 ans et 25% des 9-11 ans lisent quotidiennement, selon le ministère de l'Éducation Nationale. Ces jeunes lecteurs assidus, et ce n'est pas un hasard, se retrouvent parmi les premiers de leur classe. "Peu importe le style de lecture : BD, livres pour enfants, magazines, romans d'aventures ou contes. L'essentiel est qu'ils lisent avec plaisir, sans contrainte", assure le linguiste Alain Bentolila. Et pour cela, les parents doivent donner l'exemple : "Les enfants agissent beaucoup par imitation. S'ils voient leurs parents lire, ils font naturellement de même", affirme Yvanne Chenouf, présidente de l'Association française pour la lecture. Ainsi, Mathieu Rebut, polytechnicien, et son épouse Evelyne, diplômée de Sup aéro, qui ont observé ce principe, sont très fiers de leur fils. A 5 ans, Guillaume sait lire tout seul. Livres et magazines pour enfants, albums d'Astérix et des Schtroumpfs…, il dévore tout ce qui lui tombe sous la main. "Il a appris l'alphabet grâce à un ordinateur d'éveil", raconte sa mère (…).

(…) Ce petit garçon gâté par la nature (et par des parents très attentifs à son développement) ne fera donc pas partie des quelque 30% d'élèves qui arrivent au collège sans maîtriser totalement la lecture, l'écriture et les opérations fondamentales de calcul. "La lecture est la clé de voûte de la réussite scolaire ; or, dès l'âge de 6 ans, 11% des enfants sont déjà dans le couloir de l'illettrisme", déplore Alain Bentolila. La faute au système éducatif : le nombre d'élèves par classe (23 en moyenne en primaire) et la méthode dite "semi-globale". Utilisée depuis les années 1970, elle consiste à reconnaître d'abord le mot, puis à décoder les syllabes. "Résultat : 20% des écoliers lisent mal, car ils devinent les mots sans les déchiffrer vraiment", s'insurge Colette Ouzilou, orthophoniste (…). [Les secrets de la réussite sociale, in Capital, n°125, Paris, février 2002, pp. 94-114]


Ainsi que je l'ai déjà raconté ailleurs, j'ai rencontré cette fillette en rentrant chez moi, un soir, alors qu'elle faisait de la trotinette dans le couloir de l'immeuble. Deux ans et demi, fille d'une femme de ménage peu instruite logée par ses employeurs en face de mon appartement, quelque part dans le seizième arrondissement de Paris.

À ma grande surprise, la gamine connaissait déjà tout son alphabet ; c'est elle, du reste, qui m'a spontanément apporté le petit jouet en forme d'ordinateur dont elle se servait pour apprendre à lire et à compter, entre autres acvités.

Et voilà comment, vers ses trois ans, j'ai commencé à lui faire faire ses premiers exercices d'écriture, puis des dictées... Ci-dessous, on la voit entre trois ans et demi et cinq ans, soit entre la pré-maternelle et la Grande Section de Maternelle. Je n'ai pas eu besoin de lui apprendre à tenir un crayon ; elle savait déjà le faire, mais essentiellement pour dessiner.

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La tenue correcte du crayon est un geste essentiel, préalable à tous les autres apprentissages. La comparaison entre inès, ci-dessous, à gauche, et sa congénère Kikuko, qui a exactement le même âge (autour de quatre ans), est particulièrement parlante : notre petite néophyte franco-japonaise tient encore son crayon "en poignard", avec ce bras tendu, même si elle commence à faire intervenir le pouce et l'index, chose qu'elle ne faisait pas au début.

Avec les tout petits, tout se passe comme si la main commandait tout le reste, en bon prolongement du cerveau qu'elle est. Comme on peut le voir, les deux enfants travaillent en autonomie, une fois qu'elles ont compris la consigne, ici reproduire des figures (lettres) à partir d'un modèle, par imitation, voire faire passer un feutre sur un tracé préexistant (à droite), en s'efforçant de ne pas sortir du tracé.

Même âge administratif, mais grosses disparités en termes d'âge mental, de schéma corporel, de maîtrise posturale, de bagage lexical, d'élocution, etc. À vue de nez, en attribuant à Inès son âge véritable, on aurait jugé Kikuko plus jeune de deux ans, sauf au piano, "jouet" avec lequel elle était parfaitement familiarisée.

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Dès la petite section de maternelle, Inès va commencer à intriguer ses enseignant(e)s, mais c'est au CP que les choses vont prendre un tour tout à fait inattendu. Ci-dessous, elle doit avoir autour de quatre ans et demi, en Petite Section de Maternelle, et elle compte déjà et maîtrise l'addition et la soustraction sans retenue. Le principe est fort simple : je lui avais préparé une grille sur laquelle il suffisait d'aligner les chiffres. Et comme on le voit ici, elle pouvait déjà travailler en toute autonomie.

Et moi de penser à chaque fois : c'est fou ce qu'on peut perdre comme temps à l'école ! Parce que, dans le même temps, à l'école, on commençait déjà à s'arracher les cheveux, ne comprenant pas comment cette fille d'une femme de ménage pouvait déjà savoir autant de choses.


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Comme je l'ai déjà signalé auparavant, Inès ne restera pas ma voisine bien longtemps, ce qui fait que je ne la verrai plus que de temps en temps. Je ne l'aurai, donc, fait travailler qu'une demi-douzaine de fois au total, entre la Petite et la Grande Section de Maternelle. Petite, moyenne, grande section : les premières syllabes à recopier, les premiers mots, les toutes premières dictées de mots. J'estime que la fillette aurait pu éviter la dernière année de maternelle, qui ne lui aura servi à rien. Quant au CP...


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Ci-dessus, à gauche, Inès doit avoir autour de 5 ans, voire un tout petit peu plus, et doit être en Grande Section de Maternelle. Elle connaît tous les sons de base ; il reste à aborder quelques voyelles et consonnes complexes (ch, ph, qu, gn , au, eau, ein, ain, en, am...), ce qui aurait pu prendre entre trois et six mois. Seulement voilà, je ne la vois plus que de temps en temps. Il n'empêche que l'avance sur les camarades de classe est considérable.

Les gros problèmes vont apparaître l'année d'après, en Cours préparatoire, avec une instutrice nourrie à... et intoxiquée par la méthode globale de lecture. Je m'en suis très vite rendu compte, le jour où Inès m'a présenté son cahier d'écriture et de lecture (à base de textes bricolés par l'enseignante, indice majeur permettant d'identifier la quasi-totalité des adeptes de la méthode dite globale de lecture) : dès le premier jour de classe, les enfants de cette classe de CP ont ainsi été invités à retenir, par coeur, la graphie de tous les prénoms de la classe, y compris les Ophélie, les Damien, les Alexandre, les Stéphanie, les Charzadeh...

J'en suis resté bouche bée. Mais le plus fort fut le jour où la mère de l'enfant m'a annoncé que la maîtresse l'avait convoquée pour lui apprendre que sa fille avait d'énormes difficultés en lecture, et qu'elle devait être dyslexique. Et là, j'avoue que j'ai vu rouge.

- Qu'est-ce qu'elle a dit ? Dyslexique ? Non mais, ça ne va pas ? Vous allez me donner son numéro de téléphone, pour que je lui dise deux mots à cette idiote !

Mais la mère a tenu à s'éviter un scandale avec l'école et a refusé de me communiquer les coordonnées de l'enseignante, une de ces pauvres idiot(e)s qui jouent aux apprentis-sorciers et aux apprenties-sorcières en touillant dans leur infecte tambouille, et tant pis si des enfants traversent tout le cycle primaire sans jamais maîtriser le lu ni l'écrit.

 

Bilan : deux ans !

Tout ce qui précède aurait pu être réalisé par Inès en deux ans, soit entre les âges de deux ans et demi et quatre ans et demi, voire entre ses deux et ses quatre ans.

Il se trouve qu'à deux ans et demi, Inès connaissait déjà tout l'alphabet. Du coup, il ne lui a fallu que peu de séances (probablement deux) pour apprendre à former correctement les lettres. Par la suite, je l'ai vue moins de six fois, après que sa mère et elle ont déménagé. Tout ce qui précède a, donc, été réalisé en moins de six séances d'une heure chacune ! C'est dire les résultats que nous aurions obtenus si j'avais pu faire travailler cette gamine cinq fois par semaine, à raison de deux petites heures par jour. Je puis tranquillement affirmer qu'entre ses deux ans et ses quatre ans, Inès aurait largement assimilé le programme de la Maternelle et du Cours préparatoire.

Mais à la réalité, mon plus grand regret est que cette gamine n'ait pas été ma fille ! Car, à chaque fois que je la faisais travailler et examinais ses livres et cahiers d'école, je ne pouvais m'empêcher de m'indigner intérieurement sur le temps considérable que l'on fait perdre aux enfants à l'école ! De fait, j'ai toujours estimé que trois années de maternelle, ça faisait au moins une année de trop.

Mais, de toute manière, une seule heure de classe sous la direction d'une enseignante idiote, c'est déjà une heure de trop !


On résume ?

Prenez un enfant de deux ans, capable de manger un yaourt avec une petite cuiller et déjà assez volubile, offrez-lui un petit ordinateur en plastique aux couleurs fluo, mais surtout, parlant. Vers ses deux ans et demi, notre enfant devrait déjà bien connaître son alphabet latin. Par la suite, à raison d'une petite matinée par jour, cinq jours par semaine, il suffirait de trois à quatre mois pour lui faire franchir chacun des quatre niveaux administratifs allant de la Petite Section de Maternelle au Cours Préparatoire, soit moins de deux années au total, ce qui amènerait l'enfant à l'entrée du CE1 vers ses quatre ans.

C'est précisément ce tempo qu'observent tous les enfants abusivement qualifiés de surdoués, et qu'il faudrait plutôt qualifier de précoces, dans la mesure où l'expérience montre que leur vivacité intellectuelle doit avant tout à la précocité et à l'abondance des stimulations intellectuelles et sensorielles dont ils vont bénéficier non pas à l'école (Mozart n'a jamais connu la moindre institution scolaire) mais à la maison.

Qu'on se le dise, donc : la première et la plus importante de toutes les Zones d'Éducation Prioritaire, c'est le domicile familial, auprès de papa, des frères, soeurs, oncles, tantes, grands-parents et, surtout, de maman !



P.S. Cela va sans dire, mais ça va mieux en le disant : vous aurez remarqué que mon propos se situe à des années-lumière de toutes ces expériences pédagogiques que l'on vend aux parents ici ou là, puisqu'on trouve même des spécialistes qui vous affirment, mordicus, que l'enfant peut apprendre à lire dès neuf voire six mois. Pourquoi pas, s'il s'agit de "fabriquer" de pseudo-génies. Et sur ce plan, les forums de discussion sur Internet ne chôment pas !

Pour que les choses soient parfaitement claires, je précise que j'à chaque fois que l'occasion s'est présentée, je me suis toujours enquis auprès des parents de la capacité de l'enfant à manger proprement un yaourt et à s'exprimer de manière intelligible, ce qui n'a rien à voir avec un âge pré-établi, mais qui nous fournit des indices incontestables des capacités intellectuelles et comportementales de l'enfant, bref, de sa maturité psycho-motrice, pour parler comme les spécialistes des sciences cognitives. Autrement dit, c'est l'enfant et lui seul qui décide. Il est vrai qu'il est toujours possible de modifier une posture sur le clavier d'un piano, la préhension d'une flûte, d'une fourchette, d'une règle... Tout est avant tout question de "feeling", de jugeote de la part du pédagogue, et certainement pas d'idéologie fondée sur des dogmes. Ce genre de dérive, je le laisse aux adeptes de la psychanalyse et autres mouvements sectaires avec leurs recettes pré-établies et pré-digérées par des gourous, appliquées de manière automatique et moult fois re-digérées par des oies dociles et consentantes !

Dans la rubrique "Rions un peu", enfin, je me comprends : le genre de choses que l'on lit sur les forums de discussion...

Juste en passant, dans la pédagogie Montessori aussi, on apprend les lettres (pas à lire, juste les lettres) tôt, sous forme d'ateliers ludiques car il ne faut pas oublier le jeu dans tout ça. En revanche, elle déconseille fortement de donner des crayons aux enfants, pour dessiner par exemple. Elle dit que cela donne de mauvaises habitudes manuelles et qu'ensuite les enfants galèrent pour écrire.

Elle déconseille fortement de donner des crayons aux enfants... Cela donne de mauvaises habitudes manuelles...

N'importe quoi !

 


       
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